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"Le rêve américain de Champlain" à Brouage
"Le rêve américain de Champlain"
à Brouage
Le vendredi 13 novembre 2009, la Maison Champlain à Brouage a accueilli Christian Morissonneau. Cet historien-géographe québécois était l'invité du Conseil Général de Charente-Maritime, représenté par Marc Pellacœur. La presse locale et des représentants d'associations concernées par le Canada étaient là pour écouter l'auteur parler de son dernier ouvrage : "Le Rêve américain de Champlain".
Le Caribou avait sauté sur l'occasion de voir en chair, en os et en barbe un conférencier qui avait déjà fait l'objet d'un article L'histoire de Champlain au grand jour dans l'Hebdo Rive Nord quelques semaines auparavant pour le lancement de son livre au Québec. Christian Morissonneau vient de l'Assomption, à quelques lieues de Saint-Sulpice. Il enseigne à l'Université du Québec à trois-Rivières.
Jacques Cartier et Samuel Champlain : comment cerner l'un et l'autre ? Pour Christian Morissonneau Jacques Cartier est un explorateur dont la mission fut plutôt un échec parce qu'une implantation durable ne s'était pas faite ; et il a vu la France brader ses territoires. (En outre plus tard on vend la Louisiane aux Américains !)
Samuel Champlain est un découvreur et un fondateur.
Qu'est-ce qu'on ne connaît pas de lui ?
- sa date de naissance (aux environs de 1570)
- sa religion (catholique ou protestant)
- le statut social de ses parents (sans doute pas des nobles)
- le lieu de son tombeau (pas dans la cave d'un restaurant grec de Québec comme un temps envisagé...)
- sa figure et sa taille (les portraits de lui ne sont qu'imaginés)
On sait qu'il a fait 23 traversées, qu'il a parcouru 35 000 km le long des côtes en bateau ou en canot, qu'il a passé autant de temps en France qu'au Québec pendant ses années d'activités nord-américaines.
Il n'a jamais été nommé gouverneur. Il n'a été que le représentant de quelqu'un ou le représentant du représentant ! (Au départ il est l'employé de Dugua de Mons.)
C'est un très bon observateur mais il n'avait pas imaginé que l'Amérique puisse faire 6 000 km de large au nord alors qu'il a peut-être vu les 60 km de l'isthme de Panama lors d'une précédente expédition avec les Espagnols !
Le choix de Québec était un choix obligé parce que c'était une zone de contact avec les indiens et une base de départ. Autrement, dès 1603, Champlain préférait Trois-Rivières, au débouché de la traite des fourrures.
Le castor c'était l'Eldorado pour cette partie de l'Amérique du Nord. Cependant Champlain veut trouver mieux que la fourrure.
(Jusque-là un groupe, dont l'importance était sous-estimée, était les Basques qui venaient pour les baleines, les morues et les fourrures. De Trois-Rivières on remontait la rivière Saint-Maurice et on était sur le chemin de la Baie James où se faisaient les captures.)
Champlain obtint un accord entre les Français et les Montagnais pour que les premiers assistent les seconds dans leurs guerres contre les Iroquois. On était dans un rapport de vassalité. Les Français étant les seigneurs et les Montagnais les vassaux qui profitaient d'une protection en échange, surtout, d'un approvisionnement en fourrures.
En remontant la rivière des Iroquois (rivière Richelieu) avec les Hurons, les Algonquins et les Montagnais en 1609, la troupe se heurte aux Iroquois au bout d'un lac qui sera nommé - pas de modestie - le lac Champlain... Beaucoup de noms de lieux d'Amérique du Nord ont pour origine la langue française, au-delà d'une frange de noms amérindiens.
Les relations avec les indiens, spécialement les Montagnais (et pas vraiment les Iroquois) étaient bonnes. Champlain a voulu des échanges de jeunes Français avec de jeunes indiens.
La France voulait une colonie de peuplement en plus d'une colonie commerciale. (Il ne fallait pas qu'il n'y ait que le commerce pour pouvoir perdurer.)
Champlain a écrit cinq rapports. Il a établi 33 cartes. Il a fait des travaux de naturaliste. Il a fait une évaluation de la richesse des terrres découvertes. Et, en plus d'être un découvreur, il voulait faire connaître aux Français ce qu'il y avait de l'autre côté de la mer océanne.
Il fallait avoir une solide constitution physique pour faire tout cela, être un surhomme !
Son épouse ? Calviniste, comme Dugua de Mons. Agée de 12 ans au moment du mariage arrangé. Elle apportait beaucoup d'argent... L'acte notarié pouvait faire croire, par complaisance, que Champlain avait la particule de noblesse.
Champlain n'avait sans doute pas eu d'éducation institutionnelle. Par exemple, dans ses écrits, il n'y a aucunes références grecques ou latines. Samuel a dû apprendre sur le tard lors d'un séjour en Espagne. (Indice : il mesure en lieues espagnoles !)
Il a trouvé, chez les indiens, une société plus égalitaire que la nôtre à l'époque. Les femmes avaient des prérogatives. Les hommes parlaient : l'éloquence était importante (elle l'est toujours en politique !). Elle servait à désigner et promouvoir le chef qui était à la fois chef de guerre, chef de paix, chef de chasse.
Les relations avec les indiens n'étaient pas que militaires ou commerciales. Les Basques avaient déjà inauguré des relations plus intimes...
Samuel Champlain demandait que les "habitants" (= ceux à qui le roi avait accordé des terres) qui s'installaient devaient avoir autant de terres qu'ils le voulaient, avec les droits de chasse et de pêche.
Il souhaitait que la société soit plus égalitaire et que la Nouvelle-France devienne une nation franco-amérindienne.
(Une question a été posée sur l'attentat dont Champlain avait été victime : on soupçonne les Basques jaloux...)
AlCaribou
Tags : champlain, morissonneau, brouage