• Marée noire en Louisiane : revue de presse du 22 mai 2010

     
     
     
     
     
     
    Marée noire: les marais de Louisiane défigurés pour longtemps

    VENICE (Etats-Unis) — Sanctuaire d'un écosystème fragile, les marais de Louisiane, qui ont déjà été détruits sur près de 55 km par la marée noire dans le golfe du Mexique, risquent d'être défigurés pendant des décennies, s'inquiètent des experts.

    Le brut a atteint les marais de Louisiane mercredi et 55 kilomètres de bayous et de plages de l'Etat ont été souillés. "Tout est mort", a déclaré jeudi Billy Nungesser, le président du comté le plus touché par le pétrole qui s'écoule depuis le 22 avril dans le golfe du Mexique.

    "Il n'y a plus de vie dans ce marais. On ne pourra pas nettoyer", a-t-il dit sur la chaîne MSNBC.

    Revenant d'un tour en bateau dans l'estuaire du Mississippi, le gouverneur de Louisiane, Bobby Jindal, avait par ailleurs lancé mercredi: "le jour que nous avions tous craint est arrivé aujourd'hui". "Le pétrole (lourd) est là, et nous devons agir maintenant", a déclaré l'élu un mois après l'explosion de la plateforme Deepwater Horizon, soulignant que "fondamentalement la marée noire menace le mode de vie de la Louisiane".

    Labyrinthe de canaux et d'étangs, les bayous de cet Etat méridional représentent 40% des marais des Etats-Unis. Largement inhabités, ils constituent une halte de choix pour les oiseaux qui migrent et sont le berceau d'une vie marine riche et diversifiée. Poissons, crevettes, huîtres, moules ou crabes: l'industrie halieutique de l'Etat représente 2,4 milliards de dollars par an.

    Avec l'infiltration croissante du pétrole, cet écosystème risque d'être mis à mal pour des décennies, s'inquiètent scientifiques et écologistes.

    "On commence juste à voir arriver du pétrole dans les marais et cela va avoir un énorme impact pour des années, si ce n'est des décennies", déclare à l'AFP John Hocevar, biologiste chez Greenpeace. Le brut "va affecter les poissons, la faune et la flore du golfe" du Mexique, abonde le Dr. Steve Murawski, vétérinaire à l'Agence américaine des parcs nationaux.

    Ingérés par le plancton, les poissons, crustacés et autres tortues de mer, les produits toxiques contenus dans le pétrole, qui continue de se déverser dans les abysses du golfe du Mexique, va se répandre dans la chaîne alimentaire, s'inquiètent-ils. Entre autres, le sort des thons rouges est préoccupant car "la marée noire a lieu en plein milieu de leur période de reproduction", indique M. Hocevar.

    Face au travail herculéen que représente la décontamination des marais, les grands moyens sont envisagés, alors que près de 20.000 personnes participent aux opérations menées sur les côtes de Floride, Alabama, Mississippi et Louisiane.

    Si le nettoyage du rivage avec de l'eau et des écumoires ne suffit pas, les autorités pourraient mettre le feu aux marais souillés. "En dernier recours", souligne le capitaine des garde-côtes Edwin Stanton, qui dirige les secours en Louisiane, lors d'un entretien accordé à l'AFP. "Nous l'avons déjà fait par le passé, c'est une tactique acceptable pour enlever le pétrole. Mais on ne peut le faire qu'une seule fois", dit-il, affirmant que "la végétation des marais repoussera ensuite".

    Cette solution "pourrait causer plus de dommages que si on laissait le pétrole se dégrader naturellement", pense LuAnn White, scientifique à l'Université Tulane de La Nouvelle-Orléans.

    De toute façon, "le mal est déjà fait", estime John Hocevar.

    Le biologiste de Greenpeace ajoute: "En Alaska, 20 ans après (le naufrage du pétrolier) Exxon Valdez, la faune continue toujours d'ingérer le pétrole provenant de cette marée noire. Et la marée noire qui touche le golfe du Mexique actuellement est bien plus importante".

    Marée noire: les plages de Louisiane s'ornent de taches brunâtres

    De Clément SABOURIN (AFP) – Il y a 1 jour

    GRAND ISLE (Etats-Unis) — L'inexorable progression de la marée noire dans les marais de Louisiane, déjà maculés sur 80 kilomètres, et les approximations de BP sur la quantité de brut qui s'écoule dans le golfe du Mexique attisaient vendredi la colère des habitants et élus locaux.

    L'Agence maritime américaine NOAA a affirmé vendredi que près de 80 km de bayous, plages et côtes de l'Etat étaient souillés par le pétrole.

    "Ce n'est que le début", s'exclame avec colère et dépit Lana Downing, une Louisianaise de 69 ans qui possède une résidence secondaire à Grand Isle en regardant la grande plage de cette station balnéaire entachée de brut. "Hier c'était le premier impact, c'était en petite quantité. Aujourd'hui, il y en a partout!", dit-elle à l'AFP.

    Les autorités municipales ont annoncé vendredi la fermeture de cette plage, longue de plusieurs kilomètres, mais cette mesure n'empêchait visiblement pas badauds et curieux de venir inspecter la matière brunâtre aux reflets orangés échouée sur le rivage. Le brut, assez liquide, ne se voit pas dans la mer, mais seulement une fois qu'il touche la côte.

    Sur le rivage, une vingtaine de personnes avec des pelles ramassaient le liquide visqueux pour le mettre dans de grands sacs plastiques blancs.

    Et à proximité, le centre de commandement de BP a aussi commencé à former des volontaires pour aller nettoyer les plages, à partir de samedi, moyennant 10 dollars l'heure.

    Mais comme le pressentent les vacanciers, le désastre écologique que connaît le très fragile écosystème de Louisiane, berceau de plusieurs centaines d'espèces animales, n'en est qu'à ses débuts.

    Dans le golfe du Mexique, à 1.500 mètres de profondeur, le pétrole continue de se déverser, sans que l'on sache toutefois dans quelles proportions.

    Jusqu'à présent, BP avançait le chiffre de 5.000 barils de brut (800.000 litres) s'écoulant quotidiennement dans la mer. Mais, après des déclarations d'experts assurant que cette quantité était largement sous-évaluée, le groupe a finalement avoué jeudi l'avoir sous-estimé.

    Et vendredi, alors que BP avait annoncé la veille qu'il parvenait enfin à récolter 5.000 barils par jour en provenance de la fuite, un porte-parole du groupe John Curry a indiqué que cette quantité n'était plus que de 2.200 barils. Le responsable a expliqué cette divergence en soulignant que le flux de pétrole était fluctuant.

    Sur ABC vendredi, Doug Suttles, le directeur d'exploitation de BP, a en outre indiqué que le groupe, auquel les autorités ont demandé de changer de produit dispersant, "n'a pas encore trouvé de meilleur produit que le Corexit", une substance qui, selon des défenseurs de l'environnement dont Greenpeace, cause de graves dommages à la faune et la flore.

    Sur place, habitants et élus laissent libre cours à leur colère.

    "La marée noire met en danger notre mode de vie", ne cesse de répéter le gouverneur de Louisiane Bobby Jindal, prévenant dans la foulée qu'il pourrait déjà être trop tard pour sauver les 60.000 emplois liés au secteur de la pêche.

    "Il n'y a plus de vie dans ces marais (...). Nous ne cessons de demander à BP de prendre ses responsabilités", insistait jeudi Billy Nungesser, le président de la paroisse (comté) de Plaquemines, au sud de La Nouvelle-Orléans.

    Plus à l'Est, la Floride a étendu l'état d'urgence en vigueur dans une partie de l'Etat à des zones comprenant l'archipel des Keys et la ville de Miami. Car le brut aspiré par le "Loop Current", un puissant courant marin, pourrait atteindre les côtes de cet Etat dans les prochains jours.

    Pour sa part, Cuba surveille de près la progression de la marée noire, mais il n'y a, à ce stade, "aucune menace

    Au-dessus du «Deep water» à la verticale de la marée noire 

    Mots clés : Marée noire, Marée noire, ETATS-UNIS, ETATS-UNIS

    Par Thierry Portes
    20/05/2010 | Mise à jour : 13:32 Réaction (4)
    Une plate-forme pétrolière sur la nappe de pétrole dans le golfe 
du Mexique.
    Une plate-forme pétrolière sur la nappe de pétrole dans le golfe du Mexique. Crédits photo : AP

    REPORTAGE - Depuis l'explosion de la plate-forme off­shore Deepwater Horizon, le 20 avril dernier, des travaux sont conduits 24 heures sur 24 au large de la Louisiane.

    Quand s'est ouvert l'arrière de l'avion des gardes-côtes volant à basse altitude au-dessus de l'ancienne plate-forme Deepwater Horizon, à la verticale de la source de la marée noire, l'odeur de pétrole a instantanément envahi la carlingue battue par les vents. Fugace, l'impression d'être dans une station-service à ciel ouvert au large de la Louisiane s'est rapidement dissipée. Puis, lors des trois passages successifs organisés pour les journalistes sanglés à tour de rôle sur les deux sièges face au vide, est apparue la dizaine de bateaux œuvrant au cœur de la marée noire. De ces navires sont manœuvrés les robots envoyés près de la fuite, à 1 500 mètres de profondeur ; de là aussi sont projetés les dispersants, ces produits qui séparent les molécules de pétrole ; de leur côté, deux bâtiments traînent un immense câble pour emprisonner le pétrole, avant de le transvaser dans un tanker. Des travaux conduits 24 heures sur 24 depuis un mois, non loin des autres plates-formes pétrolières en activité.

    Ce sont les traînées rouge et orange dues aux produits chimiques déversés qui sont ensuite les plus facilement discernables. La mer n'est pas noire. Elle est plutôt grise, son bleu naturel étant remplacé par une touche de marron. Impossible de lui trouver de la profondeur, de voir un peu sous la surface. On la sent lourde, cette mer sur laquelle n'apparaît aucune écume blanche. Pas de vagues, elle ondoie, pesamment. Et quand le soleil la frappe, cela peut créer des milliers d'étincelles, de longs scintillements, ou un éclair, comme sur une plaque d'aluminium.

     

    «Je la vois avancer»

    «Non, ce n'est pas comme si on versait de l'huile dans une baignoire», explique le copilote, le lieutenant Andy Greenwood. Depuis le début de la catastrophe, il survole chaque jour la nappe de pétrole. «Et chaque jour, je la vois avancer», dit-il, en montrant son dernier relevé. L'écart avec le précédent, celui de la veille, est impressionnant. Les images satellite, reproduites sur les sites des agences fédérales américaines, n'offrent pas un aussi saisissant compte rendu de l'étendue de cette marée noire. «Nos cartes et les photographies satellite correspondent», assure pourtant le lieutenant, comme il certifie, lui qui vole au-dessus de cette zone depuis de nombreuses années, qu'il n'y avait pas d'odeur de pétrole avant la catastrophe, et que l'on pouvait discerner des fonds marins auparavant.

    Sur le chemin du retour, il tentera bien de montrer le pétrole, plus léger, déjà un peu dilué, qui dérive vers les côtes américaines du golfe du Mexique, inexorablement. Mais même avec des lunettes de soleil et des verres polarisants, le scintillement censé trahir une plaque au milieu de l'océan Pacifique ne saute pas aux yeux du profane.

    Arrivé à la base de Houma, sur ce petit aéroport construit par et pour les compagnies pétrolières au milieu du bayou de Louisiane, le lieutenant, désormais surveillé par un responsable de la communication des gardes-côtes, n'en dira guère plus. Il aura juste cet aveu : «Le jour de l'explosion et de l'incendie, je ne pouvais pas toucher le hublot de l'appareil, tellement il était chaud ; d'abord, on n'a pas pensé à la marée noire ; on cherchait à sauver les gens de la plate-forme ; il y avait des hélicoptères, des avions et 19 différents bateaux qui tentaient de leur porter secours et de les repérer dans la mer.»

    L'ampleur prise par cette catastrophe écologique a déjà fait oublier que 11 des 126 personnes présentes le 20 avril dernier sur la plate-forme Deepwater Horizon sont mortes, 17 ayant été blessées. Quand, peu avant 10 heures ce soir-là, de l'eau et de la boue, suivies par du gaz, se sont engouffrées dans le tuyau d'extraction, remontant à toute vitesse jusqu'à la plate-forme, il a suffi d'une étincelle pour tout faire exploser. Quittant à la hâte leur poste de travail ou leur couchette, les ouvriers se sont rués vers les deux bateaux de secours, qui prendront la mer 10 minutes plus tard. Il y eut une deuxième explosion, des flammes gigantesques. S'étant récemment confiés au «New York Times», des survivants ont parlé d'une «tornade de feu». Durant l'attente dans les bateaux de secours, «on croyait tous qu'on allait mourir», a raconté un rescapé, un second revoyant l'image de ses collègues qui sautaient dans la mer parmi les flammes.

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    Marée noire: sur une plage de Louisiane, du pétrole "partout et ce n'est que le début"

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    <btn_noimpr> </btn_noimpr> 22.05.2010, 00h10
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    Les premières galettes de pétrole sont arrivées jeudi. Et puis, vendredi, ce sont des bandes entières d'hydrocarbures brunâtres qui se sont échouées sur les plages de Grand Isle, en Louisiane. "Il y en a partout et ce n'est que le début", dit une habitante.
    Lana Downing, une grand mère de 69 ans, a sa résidence secondaire dans cette station balnéaire du sud des Etats-Unis. Elle est venue inspecter le littoral, "pour voir si mes petites filles peuvent se baigner". <btn_noimpr>
     
    </btn_noimpr> Mais les larges bandes de brut qui ornent la plage rendent toute baignade impossible.
    "C'est arrivé hier. Au début, il y en avait juste un peu et maintenant il y en a partout", dit-elle dans un mélange de colère et de désarroi. "Ca a mis 30 jours pour arriver, ce n'est que le début", poursuit-elle avant de rentrer chez elle, dans une des maisons sur pilotis qui longent la côte.
    Les autorités ont décidé de fermer la plage au public vendredi. Mais la grève de sable gris clair, longue d'une dizaine de kilomètres, est trop grande pour pouvoir en condamner les accès. Et les badauds sont toujours là. Pour prendre le soleil, faire un jogging, ou observer les ravages d'une catastrophe annoncée.
    Dans le centre de commandement de BP, le groupe britannique dont la plateforme naufragée est à l'origine de la marée noire, la mobilisation a sonné. "Nous recherchons, pour embauche dès que possible, 10 bateaux de pêche avec capitaine et équipage afin d'installer des barrages flottants, ainsi que 30 personnes pour nettoyer les plages", proclame une pancarte à l'entrée.
    A l'intérieur des équipes forment les volontaires qui se présentent au compte-gouttes. La formation dure quelques heures. Elle commence par quelques mots: "BP est très sensible à tout ce qui se passe ici et fait son possible pour répondre à la situation".
    Armés de râteaux, de seaux et de sacs en plastique, des équipes de nettoyage s'affairent sur la plage.
    William Clayton dirige l'une d'elles. Pour qui travaillent ses hommes, depuis quand, pour combien de temps? Il ne veut rien dire. "Tout ce que je peux dire, c'est que BP payera tout", dit-il, dans cette contrée où les hommes du géant pétrolier sont omniprésents.
    A quelques kilomètres au sud, sur une plage d'Elmers Island, une centaine d'hommes embauchés par BP ratissent la plage, alors qu'une ballet incessant de camions à benne installe des barrières de sable.
    Eric Thomson porte un casque de chantier blanc, des lunettes de soleil et des bottes noires.
    "Quand on a commencé à nettoyer à 6 heures du matin, c'était vraiment sale. On a tout nettoyé puis on est allés déjeuner. Quand on est revenus, le pétrole était partout, il a fallu tout recommencer", raconte-t-il, fumant une cigarette sous un soleil de plomb.
    "Ici, c'est chez moi, alors je veux faire tout ce que je peux pour nettoyer", dit dans un sourire ce jeune homme de 19 ans, payé 12 dollars de l'heure. "Je ne sais pas combien de temps ça va durer, au moins six mois à mon avis", dit-il sous le regard d'un cadre de BP qui accompagne la presse.
    BP, il en est aussi question dans les postes de télévision d'un fast-food de Grand Isle. Une télévision locale diffuse des publicités qui conseillent aux habitants de se tourner vers des avocats pour gérer leur indemnisation. "Récupérez tout l'argent qu'on vous doit", dit une de ces réclames.
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    Marée noire: 2.000 barils/jour pompés

    AFP
    18/05/2010 | Mise à jour : 09:37 Réagir

    Le groupe pétrolier britannique BP a estimé aujourd'hui à 2.000 barils par jour le volume de pétrole qu'un système de tuyau sous-marin lui permet de récupérer du flux qui continue à s'écouler dans le golfe du Mexique, une marée noire qui lui a déjà coûté 625 millions de dollars.

    Des responsables du groupe avaient indiqué la veille que le système de siphon mis en place sur la fuite, à 1.500 mètres de profondeur, et amenant le pétrole pompé sur un navire en surface, permettait de récupérer 1.000 barils par jour, sur les 5.000 qui s'écouleraient actuellement.

    Le groupe a évoqué aujourd'hui le chiffre de 2.000 barils par jour dans un communiqué. Mais il précise qu'il faudra "un certain temps" pour accroître ce flux. Le groupe indique continuer à réfléchir à un système de bouchage du puits qui serait ensuite cimenté.
    En surface par ailleurs, 750 bateaux tentent de récupérer et de disperser le pétrole qui flotte : 158.000 barils ont été récupérés à ce jour, selon BP. Quelque 19.000 personnes employées par BP, d'autres entreprises et par des agences gouvernementales travaillent actuellement sur cette marée noire, indique le groupe.

    Il a déjà enregistré 15.600 plaintes et réglé par des dédommagements 2.700 dossiers.
    La marée noire a pour l'instant coûté 625 millions de dollars au groupe pétrolier, notamment via le versement à la Floride, à l'Alabama, à la Louisiane et au Mississippi d'un total de 70 millions de dollars de subventions pour atténuer les effets de la marée noire.

    Cette catastrophe a été provoquée par le naufrage d'une plate-forme de BP, Deepwater Horizon, le 22 avril après une explosion. L'accident a fait onze morts.

     

    En Louisiane, la marée noire chez les Indiens du bayou 

    Mots clés : marée noire, LOuisiane, ETATS-UNIS, BP

    Par Thierry Portes
    20/05/2010 | Mise à jour : 22:10 Réaction (8)
    Le gouverneur de Lousiane, Bobby Jindal (avec l'épuisette), 
constate jeudi les dégâts dans les marais.
    Le gouverneur de Lousiane, Bobby Jindal (avec l'épuisette), constate jeudi les dégâts dans les marais. Crédits photo : AP

    Un mois après l'explosion de la plate-forme «Deepwater Horizon», le pétrole a touché terre jeudi. 

    «Ils nous ont pris nos terres ; ils ont amené l'eau de l'océan en creusant des canaux pour que leurs bateaux rejoignent leurs plates-formes dans les marais ; maintenant ils nous envoient une marée noire»… L'accent traînant de Kirk Cherame, Indien de la tribu Houma, renforce le poids de sa complainte contre ces compagnies pétrolières, arrivées au début des années 1930 dans ce bayou au sud de la Louisiane, qu'elles ont peu à peu annexé. Jeudi, c'est devenu officiel : le pétrole, issu du puits sous la plate-forme BP Deepwater Horizon détruite le 20 avril dernier, a commencé à pénétrer les canaux et marécages. «Ce brut que tout le monde redoutait est maintenant ici ! », s'est exclamé Bobby Jindal, le gouverneur de la Louisiane, lors d'un tour d'inspection en bateau.

    Entre eau, herbes et boues, le désastre écologique est en marche, dans cette gigantesque zone de reproduction du plus giboyeux et poissonneux État américain. Une fois le plancton et les micro-organismes détruits, c'est toute la chaîne alimentaire - huîtres, crevettes, poissons, oiseaux - qui sera touchée. Jusqu'aux hommes qui vivent de la pêche.

    Structurée socialement autour de cette activité, la tribu indienne Houma, qui revendique 17000 âmes dans le sud de la Louisiane, pourrait ainsi se déliter. Le bayou appartiendrait alors entièrement aux maîtres de l'or noir.

    Pour les pêcheurs, le combat était par trop inégal. Entre Port Fouchon, où sont arrivées les premières boulettes de mazout il y a deux semaines, et Houma, cette ville qui tire son nom de la tribu éponyme, la plupart des familles, même celles où l'homme part sur son bateau, ont un salaire versé par l'industrie pétrolière. Les routes, les bâtiments, les écoles, tout a été peu ou prou financé par l'or noir, bien que la Louisiane demeure le plus gros producteur de poissons et de fruits de mer des États-Unis.

     

    «La chevrette va crever» 

    Le bayou, l'une des premières réserves écologiques de l'Amérique, est quadrillé par les plates-formes pétrolières et un important réseau de pipelines. À Port Fouchon, le responsable de l'État de Louisiane chargé d'encadrer tout journaliste désireux de constater l'avancée de la marée noire sur la plage, n'en fait pas mystère : «18 % des besoins en pétrole des États-Unis passent par Port Fouchon. Rien ne doit arrêter le trafic ici, car cela aurait des conséquences sur le pays tout en entier.» Tournant le dos, comme pour le protéger, à un vaste complexe pétrolifère, cet officiel entend signifier que le va-et-vient des bateaux entre les plates-formes en mer et Port Fouchon ne sera pas retardé par des opérations de décontamination.

    Aujourd'hui du côté des pêcheurs, Kirk Cherame, a, lui aussi, longtemps travaillé pour le camp ennemi. «Mais je n'y retournerai pas, promet-il. Ce qui me fait le plus du mal, c'est d'imaginer que je vais peut-être devoir quitter cette terre, remonter vers le nord. Ma fille déjà ne reviendra pas : à quoi bon, si on ne peut plus pêcher, plus se baigner dans l'océan !»

    Kirk Cherame vivrait cet exil forcé comme une nouvelle épreuve imposée à son peuple. Repoussés par la jeune nation américaine tout en bas de la Louisiane, les Houmas s'étaient installés dans ce bayou infecté de moustiques et de caïmans. Alliés des Français dont ils parlent encore la langue, ce surprenant cajun, ils ont été ensuite floués par les anglophones attirés par la découverte de pétrole dans le sud de la Louisiane.

    Maintenant la marée noire met peu à peu au chômage tous les pêcheurs. Sans lien évident de parenté avec Kirk, Roy Cherame a accepté les conditions de BP, déposé ses filets, et n'attend plus qu'un coup de téléphone de la compagnie pétrolière pour s'enrôler à son service. Le cachet de 2000 dollars par prestation l'a appâté. Mais, alors qu'il doit laisser son bateau à quai, le téléphone n'a toujours pas sonné depuis deux semaines. Roy parle en cajun de la «chevrette » (la crevette), qui vit au fond des marais. «Si l'huile entre en dedans, la chevrette, le crabe, le poisson, tout va crever, et nous aussi on va crever.» Comme pourrait également sombrer dans la marée noire, ce français aux tournures du XVIIe siècle dont le phrasé s'apparente au québécois, encore parlé ici par certains Indiens et Cajuns, ces descendants de la Louisiane conquise par Louis XIV.

     
    En Louisiane, la marée noire arrive et la colère monte
    LE MONDE | 22.05.10 | 12h45  •  Mis à jour le 22.05.10 | 12h45
    Washington Correspondante

    ne première plage a été fermée, vendredi 21 mai, en Louisiane, par la municipalité de Grand Isle, à 150 km au sud de la Nouvelle-Orléans. Un mois après le naufrage de la plate-forme Deepwater Horizon, l'inexorable est arrivé sur les côtes, sous la forme de langues gluantes d'un liquide couleur chocolat.

     

     
    Selon les autorités, 80 km de plages, de bayous et de marécages sont maintenant pollués, alors que la fuite n'a toujours pas été colmatée et que l'entreprise BP a repoussé sa nouvelle tentative de sauvetage high-tech à mardi 25 mai au plus tôt.

    Après le dôme de confinement, et le tube aspirant, la compagnie a promis d'essayer le "Top Kill" : une procédure qui verra l'injection de ciment pour sceller le puits. L'exercice est périlleux en raison de la profondeur (1 500 m) et de l'énorme pression nécessaire pour renverser le gaz.

    Parallèlement, la colère a nettement monté à Washington contre l'attitude de la compagnie britannique et l'impuissance du gouvernement. Après dix jours de requêtes, BP a enfin transmis au Congrès les vidéos tournées 24 heures sur 24 par ses robots sous-marins. La commission de l'énergie de la Chambre des représentants a posté les images sur son site. Celui-ci a été pris d'assaut. Les spectateurs ont pu s'apercevoir que, malgré le "succès" du tube aspirant, de gros bouillons continuent à s'échapper au fond du Golfe.

    Jeudi, BP a dû admettre que les chiffres que ses spécialistes avaient mentionnés - un écoulement de 5 000 barils par jour, soit 800 000 litres - étaient nettement sous-évalués. L'administration Obama a répondu en créant un groupe de travail chargé d'évaluer les quantités diffusées. Celui-ci ne comporte aucun membre de BP. Il devrait fournir une évaluation dans quelques jours.

    TRANSPARENCE

    La Maison Blanche a dû aussi écrire à BP pour demander plus de transparence : diffuser, par exemple, les relevés de pollution marine et atmosphérique. Le New York Times a montré, vendredi, que la compagnie faisait analyser les prélèvements effectués dans les municipalités par un laboratoire travaillant notamment pour l'industrie pétrolière, dont BP.

    Un différend oppose également l'Agence pour la protection de l'environnement (EPA) au géant du pétrole sur la nature des produits dispersants utilisés en quantité astronomique (2,27 millions de litres) pour fragmenter la nappe et faciliter son évaporation. L'EPA a donné 24 heures à BP pour cesser de répandre du Corexit, produit nocif interdit il y a plus de dix ans en Angleterre, mais des stocks sont déjà arrivés en quantité en Louisiane, et BP a indiqué qu'elle allait continuer, faute d'une meilleure option pour l'instant.

    Bousculé - un phénomène assez rare - par la presse, le porte-parole de la Maison Blanche, Robert Gibbs, a eu peine à convaincre que le gouvernement faisait "tout ce qui est humainement et technologiquement possible" pour arrêter l'écoulement. "Nous sommes confrontés à un désastre dont la magnitude n'a jamais été vue dans le golfe du Mexique", a-t-il justifié.

    Barack Obama a, lui aussi, senti qu'il était nécessaire de s'expliquer. Plutôt qu'à la réforme financière, il a consacré son intervention hebdomadaire à la marée noire. Il a assuré que la réponse du gouvernement était à la hauteur, avec 24 000 personnes, plus de 1 000 bateaux et "les meilleurs esprits" du pays. Il a nommé les deux responsables de la commission d'enquête sur les forages pétroliers : Bob Graham, ancien sénateur de Floride, hostile aux forages, et William Reilly, un ancien administrateur de l'EPA et président émérite du WWF, le fonds mondial pour la nature.

    ne première plage a été fermée, vendredi 21 mai, en Louisiane, par la municipalité de Grand Isle, à 150 km au sud de la Nouvelle-Orléans. Un mois après le naufrage de la plate-forme Deepwater Horizon, l'inexorable est arrivé sur les côtes, sous la forme de langues gluantes d'un liquide couleur chocolat.

     

     
    Selon les autorités, 80 km de plages, de bayous et de marécages sont maintenant pollués, alors que la fuite n'a toujours pas été colmatée et que l'entreprise BP a repoussé sa nouvelle tentative de sauvetage high-tech à mardi 25 mai au plus tôt.

    Après le dôme de confinement, et le tube aspirant, la compagnie a promis d'essayer le "Top Kill" : une procédure qui verra l'injection de ciment pour sceller le puits. L'exercice est périlleux en raison de la profondeur (1 500 m) et de l'énorme pression nécessaire pour renverser le gaz.

    Parallèlement, la colère a nettement monté à Washington contre l'attitude de la compagnie britannique et l'impuissance du gouvernement. Après dix jours de requêtes, BP a enfin transmis au Congrès les vidéos tournées 24 heures sur 24 par ses robots sous-marins. La commission de l'énergie de la Chambre des représentants a posté les images sur son site. Celui-ci a été pris d'assaut. Les spectateurs ont pu s'apercevoir que, malgré le "succès" du tube aspirant, de gros bouillons continuent à s'échapper au fond du Golfe.

    Jeudi, BP a dû admettre que les chiffres que ses spécialistes avaient mentionnés - un écoulement de 5 000 barils par jour, soit 800 000 litres - étaient nettement sous-évalués. L'administration Obama a répondu en créant un groupe de travail chargé d'évaluer les quantités diffusées. Celui-ci ne comporte aucun membre de BP. Il devrait fournir une évaluation dans quelques jours.

    TRANSPARENCE

    La Maison Blanche a dû aussi écrire à BP pour demander plus de transparence : diffuser, par exemple, les relevés de pollution marine et atmosphérique. Le New York Times a montré, vendredi, que la compagnie faisait analyser les prélèvements effectués dans les municipalités par un laboratoire travaillant notamment pour l'industrie pétrolière, dont BP.

    Un différend oppose également l'Agence pour la protection de l'environnement (EPA) au géant du pétrole sur la nature des produits dispersants utilisés en quantité astronomique (2,27 millions de litres) pour fragmenter la nappe et faciliter son évaporation. L'EPA a donné 24 heures à BP pour cesser de répandre du Corexit, produit nocif interdit il y a plus de dix ans en Angleterre, mais des stocks sont déjà arrivés en quantité en Louisiane, et BP a indiqué qu'elle allait continuer, faute d'une meilleure option pour l'instant.

    Bousculé - un phénomène assez rare - par la presse, le porte-parole de la Maison Blanche, Robert Gibbs, a eu peine à convaincre que le gouvernement faisait "tout ce qui est humainement et technologiquement possible" pour arrêter l'écoulement. "Nous sommes confrontés à un désastre dont la magnitude n'a jamais été vue dans le golfe du Mexique", a-t-il justifié.

    Barack Obama a, lui aussi, senti qu'il était nécessaire de s'expliquer. Plutôt qu'à la réforme financière, il a consacré son intervention hebdomadaire à la marée noire. Il a assuré que la réponse du gouvernement était à la hauteur, avec 24 000 personnes, plus de 1 000 bateaux et "les meilleurs esprits" du pays. Il a nommé les deux responsables de la commission d'enquête sur les forages pétroliers : Bob Graham, ancien sénateur de Floride, hostile aux forages, et William Reilly, un ancien administrateur de l'EPA et président émérite du WWF, le fonds mondial pour la nature.

    Monde

     

     

    Publié le 22/05/2010 à 15:08 Reuters

    Barack Obama exige des garanties pour les futurs forages en mer

    Barack Obama exige des garanties pour les futurs forages en mer

    Barack Obama a annoncé dans son allocution hebdomadaire que les forages pétroliers ne pourraient se poursuivre en mer qu'à condition d'obtenir les garanties qu'une catastrophe comme celle en cours dans le golfe du Mexique ne se reproduirait pas. /Photo prise le 20 mai 2010/REUTERS/Jonathan Ernst

     
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    Barack Obama a déclaré samedi que les futurs forages pétroliers en mer seraient subordonnés à des garanties pour éviter que ne se reproduise une catastrophe comme celle du golfe du Mexique, où des fuites de brut lourd atteignent les bayous de Louisiane.

    Dans son allocution hebdomadaire à la radio et sur internet, le président américain a présenté la composition d'une commission chargée d'enquêter sur l'accident de la plate-forme opérant pour le compte de BP au large des côtes américaines.

    Il compte maintenir la pression sur les compagnies impliquées dans la fuite de pétrole qui n'est toujours pas colmatée - BP, Halliburton et Transocean - mais entend aussi veiller à ce que Washington amende ses pratiques.

    "L'objet de cette commission est à la fois d'examiner les causes fondamentales de la catastrophe et de proposer des recommandations sur la sécurité et la protection de l'environnement nécessaires pour éviter qu'un désastre similaire ne se reproduise", a dit le chef de la Maison blanche.

    Face à la colère qui monte dans les régions touchées et aux risques politiques liés à cette situation, Obama a chargé l'ancien sénateur démocrate Bob Graham et William Reilly, ex-directeur de l'Agence fédérale de protection de l'environnement (EPA), de coprésider cette commission bipartisane dont il attend un rapport dans les six mois.

    PÊCHE ET FAUNE EN PÉRIL

    La marée noire remet en question une proposition antérieure d'Obama en faveur d'une extension des forages en mer dans le cadre d'une stratégie visant à rallier des voix républicaines à une législation sur le changement climatique.

    Le président a rappelé samedi qu'il avait donné pour instruction d'inspecter tous les sites de forage en eau profonde et suspendu pour un mois toute autorisation de nouveau site.

    "Parce qu'il représente 30% de notre production pétrolière, le golfe du Mexique peut jouer un rôle important dans la sécurisation de notre avenir énergétique. Mais nous ne pourrons poursuivre le forage pétrolier en mer que si nous avons l'assurance qu'une catastrophe comparable à la marée noire de BP ne se produira pas", a-t-il dit.

    Un mois après l'explosion et le naufrage de la plate-forme Deepwater Horizon, qui a fait onze morts, des nappes de brut lourd de couleur rouille commencent à encrasser les fragiles marais situés aux abords du delta du Mississippi, menaçant zones de pêche et vie sauvage.

    "Pour moi, depuis le début, il ne s'agit avec BP que de relations publiques", déclare Roger Halphen, enseignant de Louisiane qui a travaillé dans l'industrie pétrolière et dans le secteur de la pêche commerciale. "C'est un désastre. Tout le monde dormait là-dessus et maintenant, d'un seul coup, on est dedans", a-t-il ajouté au sujet de la marée noire qui s'étend.

    ÉLECTIONS ET CRISE

    Accusée de négligence et de dissimulation, la compagnie pétrolière sise à Londres a fait savoir que ses ingénieurs coopéraient avec des experts fédéraux pour déterminer l'ampleur exacte de la marée noire. Elle a réaffirmé vendredi qu'elle s'imposait un effort de transparence pour informer le public américain de l'évolution de la situation.

    A mesure qu'apparaissent les atteintes à l'environnement et à l'activité économique, des analystes jugent possible que la marée noire handicape le président Obama aux élections de mi-mandat prévues en novembre, où ses alliés démocrates risquent déjà d'essuyer des pertes liées au taux élevé du chômage.

    La création d'une commission permet au président de marquer son rôle de leader dans une crise durant laquelle des critiques ont visé à la fois les compagnies pétrolières et les services gouvernementaux chargés d'en superviser les activités.

    Après avoir promis de contraindre les compagnies concernées à faire toute la lumière sur la fuite et à la colmater, Obama a mis en garde samedi les services fédéraux.

    "Au moment où nous demandons à BP d'assumer ses responsabilités, nous devons en demander autant à Washington", a-t-il dit. "La question est de savoir quelles leçons tirer de ce désastre pour être sûr qu'il ne se reproduise jamais."

    "Si nos lois ne sont pas suffisantes pour prévenir une telle marée noire, ou si nous ne les avons pas appliquées, je tiens à le savoir", a poursuivi Obama. "Je tiens à savoir (...) où la supervision de l'industrie pétrolière et gazière a failli.

    "Nous savons (...) que des relations de connivence entre les compagnies pétrolières et gazières et les agences qui les réglementent est un sujet de préoccupation depuis longtemps."

    BP, qui poursuit ses opérations de pompage et espère colmater à bref délai le puits endommagé, a annoncé que la quantité de brut qu'elle siphonnait était tombée à 2.200 barils par jour dans les 24 heures ayant pris fin jeudi à minuit.

    Henri-Pierre André et Philippe Bas-Rabérin pour le service français


    Corine Lesnes
    Article paru dans l'édition du 23.05.10
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    environnement

    Marée noire : 55 kilomètres de marais et de plages souillés par le pétrole

    Info rédaction, publiée le 21 mai 2010
     
    http://www.maxisciences.com
    La marée noire a finalement atteint les marais de Louisiane
    La marée noire a finalement atteint les marais de Louisiane

    États-Unis  - Alors que BP a reconnu une fuite de pétrole plus importante que prévu (voir article), la marée noire a commencé à déferler sur les marais des côtes de Louisiane. Des dizaines de kilomètres de ce fragile écosystème ont déjà été souillés.

    Ce sont en effet près de 55 kilomètres de bayous et de plages qui ont été touchés par la marée noire dans le golfe du Mexique. Des écosystèmes très fragiles, qui pourraient être défigurés pour des dizaine d'années.
    "Il n'y a plus de vie dans ces marais. On ne pourra pas nettoyer" a déploré Billy Nungesser, le président du comté de Plaquemine, le plus touché par la fuite de pétrole engendrée le 22 avril par l'explosion d'une plate-forme pétrolière du groupe BP.
    Les bayous de Louisiane représentent 40% des marais des États-Unis. Très peu peuplés par l'Homme, ils abritent des oiseaux migrateurs et constitue une immense zone de reproduction, berceau d'une très riche biodiversité marine. Si le plancton et les micro-organismes qui peuplent ses eaux sont détruits, toute la chaîne alimentaire sera alors touchée, des huîtres aux crevettes, en passant par les oiseaux. Un désastre écologique bien sûr, mais aussi économique dans un État pour lequel l'industrie halieutique représente 2,4 milliards de dollars par an.
    Ne pouvant que constater l'arrivée du pétrole dans les marais, écologistes et scientifiques s'alarment du temps qu'il faudra à ces écosystèmes fragiles pour se remettre de la marée noire. "Cela va avoir un énorme impact pour des années, si ce n'est des décennies" explique John Hocevar, biologiste chez Greenpeace.
    Alors que dans les marais, les opérations de décontamination et de nettoyage ont commencé, il pourrait être envisagé si cela n'est pas suffisant, de brûler les endroits souillés. "Nous l'avons déjà fait par le passé, c'est une tactique acceptable pour enlever le pétrole. Mais on ne peut le faire qu'une seule fois", a précisé le capitaine des garde-côtes Edwin Stanton, assurant que "la végétation des marais repoussera ensuite".
    Un avis que ne partage pas LuAnn White, scientifique à l'Université Tulane de La Nouvelle-Orléans, qui estime pour sa part que cette solution "pourrait causer plus de dommages que si on laissait le pétrole se dégrader naturellement".

     
     
     
     
     
     
     
     
     
    En Louisiane, la marée noire arrive et la colère monte
    LE MONDE | 22.05.10 | 12h45  •  Mis à jour le 22.05.10 | 12h45
    Washington Correspondante

    ne première plage a été fermée, vendredi 21 mai, en Louisiane, par la municipalité de Grand Isle, à 150 km au sud de la Nouvelle-Orléans. Un mois après le naufrage de la plate-forme Deepwater Horizon, l'inexorable est arrivé sur les côtes, sous la forme de langues gluantes d'un liquide couleur chocolat.

     

    Selon les autorités, 80 km de plages, de bayous et de marécages sont maintenant pollués, alors que la fuite n'a toujours pas été colmatée et que l'entreprise BP a repoussé sa nouvelle tentative de sauvetage high-tech à mardi 25 mai au plus tôt.

    Après le dôme de confinement, et le tube aspirant, la compagnie a promis d'essayer le "Top Kill" : une procédure qui verra l'injection de ciment pour sceller le puits. L'exercice est périlleux en raison de la profondeur (1 500 m) et de l'énorme pression nécessaire pour renverser le gaz.

    Parallèlement, la colère a nettement monté à Washington contre l'attitude de la compagnie britannique et l'impuissance du gouvernement. Après dix jours de requêtes, BP a enfin transmis au Congrès les vidéos tournées 24 heures sur 24 par ses robots sous-marins. La commission de l'énergie de la Chambre des représentants a posté les images sur son site. Celui-ci a été pris d'assaut. Les spectateurs ont pu s'apercevoir que, malgré le "succès" du tube aspirant, de gros bouillons continuent à s'échapper au fond du Golfe.

    Jeudi, BP a dû admettre que les chiffres que ses spécialistes avaient mentionnés - un écoulement de 5 000 barils par jour, soit 800 000 litres - étaient nettement sous-évalués. L'administration Obama a répondu en créant un groupe de travail chargé d'évaluer les quantités diffusées. Celui-ci ne comporte aucun membre de BP. Il devrait fournir une évaluation dans quelques jours.

    TRANSPARENCE

    La Maison Blanche a dû aussi écrire à BP pour demander plus de transparence : diffuser, par exemple, les relevés de pollution marine et atmosphérique. Le New York Times a montré, vendredi, que la compagnie faisait analyser les prélèvements effectués dans les municipalités par un laboratoire travaillant notamment pour l'industrie pétrolière, dont BP.

    Un différend oppose également l'Agence pour la protection de l'environnement (EPA) au géant du pétrole sur la nature des produits dispersants utilisés en quantité astronomique (2,27 millions de litres) pour fragmenter la nappe et faciliter son évaporation. L'EPA a donné 24 heures à BP pour cesser de répandre du Corexit, produit nocif interdit il y a plus de dix ans en Angleterre, mais des stocks sont déjà arrivés en quantité en Louisiane, et BP a indiqué qu'elle allait continuer, faute d'une meilleure option pour l'instant.

    Bousculé - un phénomène assez rare - par la presse, le porte-parole de la Maison Blanche, Robert Gibbs, a eu peine à convaincre que le gouvernement faisait "tout ce qui est humainement et technologiquement possible" pour arrêter l'écoulement. "Nous sommes confrontés à un désastre dont la magnitude n'a jamais été vue dans le golfe du Mexique", a-t-il justifié.

    Barack Obama a, lui aussi, senti qu'il était nécessaire de s'expliquer. Plutôt qu'à la réforme financière, il a consacré son intervention hebdomadaire à la marée noire. Il a assuré que la réponse du gouvernement était à la hauteur, avec 24 000 personnes, plus de 1 000 bateaux et "les meilleurs esprits" du pays. Il a nommé les deux responsables de la commission d'enquête sur les forages pétroliers : Bob Graham, ancien sénateur de Floride, hostile aux forages, et William Reilly, un ancien administrateur de l'EPA et président émérite du WWF, le fonds mondial pour la nature.


    Corine Lesnes
    Article paru dans l'édition du 23.05.10

     

    Marée noire : 492 millions de litres de pétrole déjà déversés

    Le pétrole continue de fuir dans le Golfe du Mexique, atteignant des volumes inimaginables. Un biologiste estime que la marée noire ménage des surprises pour l'avenir.


    En un mois, il s'est déversé dans la mer 492 millions de 
litres de pétrole (AFP) En un mois, il s'est déversé dans la mer 492 millions de litres de pétrole (AFP)

    Le pétrole continue de fuir quotidiennement dans le Golfe du Mexique, atteignant des volumes inimaginables.

    Il s'est ainsi déversé dans la mer, en un mois, environ 492 millions de litres de pétrole. S'il remplissait des bouteilles de lait de 3,8 litres, alignées bord à bord, le fuel aurait couvert en un moisla distance de New York à Buenos-Aires, aller-retour, 18.184 km, estiment des chercheurs.

    Si le contenant était un gymnase avec un terrain de basket, il en remplirait 102.

     

    Des surprises pour l'avenir

    Même s'il y a cinq milliards de gouttes d'eau pour une de pétrole dans le Golfe du Mexique, c'est déjà trop pour l'écosystème, estime Darryl Felder, biologiste à l'université Lafayette de Louisiane. D'autant qu'une bonne part va recouvrir des couches profondes, comme s'il se glissait sous le tapis, ménageant des surprises pour l'avenir, prévient le chercheur.

    BP annonce retirer quotidiennement 795.000 litres, autant qu'il s'en déverse. D'après la compagnie, la moitié de ce qui fuit dans la nature est du gaz.

    Marée noire: les projets de Shell en Alaska sur la sellette

    De Rob WOOLLARD (AFP) – Il y a 22 heures

    LOS ANGELES — La marée noire qui s'abat sur les plages du sud des Etats-Unis suscite des craintes à l'autre bout du pays, en Alaska, où des travaux d'exploration pétrolière doivent démarrer rapidement au large d'un Etat qui a déjà connu les dégâts causés par le pétrole.

    Dans le collimateur des écologistes: des projets de forage de Shell en mer de Beaufort (au nord de l'Alaska) et en mer des Tchouktches, au nord du détroit de Béring.

    A Washington, le secrétaire à l'Intérieur, Ken Salazar, responsable des ressources naturelles, doit donner son feu vert à partir du 28 mai, une fois rendu un rapport sur la sécurité du projet commandé par l'administration Obama.

    Le groupe anglo-néerlandais a reçu un coup de pouce la semaine dernière quand la justice a rejeté une plainte d'écologistes visant l'autorisation préliminaire accordée par le Service de gestion minier (MMS). Cet organisme, accusé de laxisme envers l'industrie pétrolière, est sur la sellette à la suite de la marée noire dans le golfe du Mexique et vient d'ailleurs d'être scindé par M. Salazar pour réduire les risques de collusion avec les pétroliers.

    Pour les écologistes, une catastrophe comme celle de l'explosion de la plateforme qui s'est produite le 22 avril au large de la Louisiane aurait des conséquences encore plus dramatiques au nord du cercle polaire, où le froid, le vent et l'éloignement compliqueraient à l'extrême les opérations de secours.

    Le site proposé par Shell à l'ouest de l'Alaska se trouve à 400 km du quai le plus proche, contre 75 km dans le cas de la plateforme de BP qui a coulé dans le golfe du Mexique, fait valoir Cindy Shogan, directrice de l'association Alaska Wilderness League.

    Si une trentaine de navires de nettoyage ont pu intervenir dans les 24 heures au large de la Louisiane, il n'y en aurait qu'une dizaine présents dans tout l'Arctique, avec une capacité de pompage sept fois plus faible, affirme-t-elle.

    Dans ses plans de secours, Shell assure pouvoir déployer dans l'heure suivant une éventuelle explosion de plateforme un "couvercle" géant qui colmaterait une fuite d'hydrocarbures. Des produits dispersants seraient immédiatement répandus sur la nappe de pétrole, tandis que des plongeurs et des robots submersibles seraient mobilisés.

    Mais pour Rebecca Noblin, directrice pour l'Alaska du Centre pour la diversité biologique, ces plans "ignorent totalement les dangers de l'environnement arctique". Shell "essaie de faire croire qu'il serait plus facile de nettoyer une marée noire dans des eaux glacées: ça ne tient pas debout", assène-t-elle.

    "En cas de marée noire, il serait extrêmement difficile de mobiliser les hommes, les bateaux et les hélicoptères nécessaires. Il faudrait acheminer les gens en avion. Et même comme ça, on ne saurait où les loger", avertit Mme Noblin.

    Une nouvelle catastrophe écologique serait dramatique pour les populations locales et la faune dans un Etat où sont encore visibles les conséquences de la marée noire de l'Exxon Valdez, le pétrolier qui a déversé 41 millions de litres de brut au sud de l'Alaska en 1989.

    "Les ours polaires sont déjà en difficulté. Une marée noire pourrait les faire passer de la survie à l'extinction", redoute Mme Noblin.

    Martha I Falk, représentante de la tribu des Inupiat, vient d'observer les opérations de secours dans le golfe du Mexique. "Dans l'Arctique, il n'y a pas de technologie prouvée pour répondre à une marée noire", a-t-elle déclaré jeudi lors d'un point de presse à Washington. "Nos baleines, nos phoques, nos ours et tout l'écosystème seraient frappés".

     

    Publié le 22 mai 2010 à 08h43 | Mis à jour à 08h46

    Marée noire: «il n'y avait rien de prévu en cas d'accident»


    Dossiers»

    Marée noire aux États-Unis

     

    Marée noire aux États-Unis

    L'une des pires marées noires de l'histoire des États-Unis menace les côtes de la Louisiane. Suivez le développement de cette «catastrophe nationale» et ses conséquences désastreuses pour l'environnement. »

    L'ancienne ministre française de l'Environnement Corinne Lepage, 
l'une... (Photo: Charles Platiau, Reuters)

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    L'ancienne ministre française de l'Environnement Corinne Lepage, l'une des premières avocates de France à pratiquer le droit de l'environnement.

    Photo: Charles Platiau, Reuters

    Laura-Julie Perreault
    La Presse

    Alors que, un mois après l'explosion de la plateforme Deepwater Horizon, le pétrole continue de se répandre dans le golfe du Mexique, La Presse a demandé à Corinne Lepage, ancienne ministre française de l'Environnement, de revenir sur les événements.

    Q Comment peut-on expliquer que la marée noire ne soit pas encore maîtrisée un mois après l'explosion?

    R Selon ce que l'on peut comprendre, il y a plusieurs raisons. D'abord, il n'y avait rien de prévu en cas d'accident. Puisqu'il n'y avait rien de prévu, rien n'était en place et il a fallu improviser.

     

    Deuxièmement, il est étonnant de constater que ce qu'a cherché BP, ce n'est pas d'arrêter la fuite pour arrêter la fuite, mais de trouver un système qui va lui permettre à la fois d'arrêter la fuite et de récupérer le pétrole. De telle sorte qu'il n'a jamais été question de remettre au goût du jour le choix qui avait été privilégié au moment de l'incident d'Ixtoc 1 (NDLR: l'explosion de cette plateforme de forage, en 1979, avait déversé 600 000 tonnes de pétrole brut dans le golfe du Mexique). À cette époque, le puits qui fuyait a été noyé sous le béton. Dans le cas qui nous intéresse aujourd'hui, il n'en a jamais été question. Peut-être que, techniquement, ce n'est pas possible, mais je suis étonnée que ce ne soit pas envisagé. Ça avait très bien marché.

    Q Voyez-vous de la mauvaise foi dans la manière dont BP gère la crise, notamment en déployant de grands vases de béton qui doivent récupérer le pétrole?

    R Non, il n'est pas question de mauvaise foi, mais on voit que la priorité est de pouvoir gagner encore un peu d'argent, même si c'est au détriment de la situation en général, et ça, je trouve ça scandaleux.

    Q En disant cela, n'accusez-vous pas BP de négligence?

    R Ce que je dis est peut-être une accusation grave, je n'en sais rien. Mais convenez que c'est étonnant de voir qu'on cherche des solutions pour pomper le pétrole avec une espèce de puits, et ce, même si ça ne fonctionne pas. Ça m'apparaît une drôle de façon de régler le problème. Je le dis sans agressivité, mais avec un certain étonnement.

    Q Comme avocate, vous avez plaidé dans deux grandes causes de marée noire. Y a-t-il des leçons que nous aurions dû apprendre du passé?

    R Je crains que nous n'ayons pas beaucoup tiré de leçons du passé, mais ce n'est pas le cas des sociétés pétrolières. Si elles ont tiré une leçon, c'était de revoir comment elles allaient s'organiser pour ne pas avoir à payer au prochain accident. À la suite de l'affaire de l'Amoco Cadiz (NDLR: un pétrolier qui a sombré au large des côtes bretonnes en 1978), les pétroliers ont décidé qu'ils ne seraient plus propriétaires des bateaux, mais affréteurs. Pourquoi? Pour échapper à la jurisprudence, qui, dans le cas de l'Amoco Cadiz, a condamné la société mère (Amoco). Cela a conduit à la situation actuelle, qui a fait qu'en France, dans l'affaire de l'Erika (NDLR: pétrolier qui a sombré au nord de la France en 1999), que j'ai plaidée il y a quelques mois, la société pétrolière Total a été condamnée pour responsabilité pénale, ce qui est grave, mais n'a pas été condamnée à payer quoi que ce soit parce que la Convention internationale sur la responsabilité civile sur le fait des pollutions exclut la responsabilité des affréteurs. C'est extravagant, mais c'est comme ça.

    Q Craignez-vous qu'un tel scénario se reproduise dans le cas de la marée noire du golfe du Mexique et que les victimes aient de la difficulté à se faire indemniser?

    R La loi en place est différente. On ne parle pas ici de pollution de mer par bateau, mais de pollution de mer par plateforme. Dans ce cas, c'est l'Oil Pollution Act qui joue et c'est un texte qui est apparu après l'Exxon Valdez. Cette fois, le propriétaire de la plateforme est responsable, mais avec un plafond extrêmement bas, de 75 millions. Le président Obama veut changer la loi pour que le plafond soit plus haut, mais il semble avoir de la difficulté.

    Pour le moment, je trouve déplorable que la société pétrolière BP et l'opérateur de la plateforme, Transocean, se renvoient la balle pour savoir qui est responsable. Ce genre de bataille peut avoir des effets terribles sur les victimes qui, dans certains cas, ont attendu jusqu'à 15 ou 20 ans pour recevoir une compensation.

    Q Vous avez été ministre de l'Environnement et avez eu à légiférer dans le domaine. Selon vous, l'administration américaine utilise-t-elle tous les leviers qui sont à sa disposition pour régler cette crise?

    R Vu de l'extérieur, j'ai le sentiment que le président n'est pas libre de faire ce qu'il voudrait. En général, je n'ai pas le sentiment que l'administration américaine jusqu'à présent a été d'une vigueur particulière pour le contrôle des platesformes offshore.

    Q Un de vos principaux chevaux de bataille ces jours-ci est l'instauration d'une cour pénale internationale pour l'environnement. Comment fonctionnerait une telle cour?

    R Les cours des différents pays ne peuvent intervenir que s'il y a de la pollution locale, des enjeux locaux. Sur la mer internationale, on aurait besoin d'une cour qui a juridiction. Dans les pays où la justice ne fonctionne pas et où les cas de pollution ne font jamais l'objet de procès, ce serait utile. Troisièmement, une cour de ce genre aurait l'avantage de permettre les poursuites quand il y a des catastrophes d'envergure planétaire. Je pense à une affaire comme Bhopal, qui, après 25 ans, n'a toujours pas été jugée.

    Q Cette cour pénale aurait-elle juridiction dans le cas de la marée noire du golfe du Mexique?

    R Pour le moment, les dégâts sont aux États-Unis et concernent les cours américaines, mais si ça touchait d'autres pays, une telle cour pourrait être utile.

     

    Experte en marées noires

    Les marées noires, l'ancienne ministre française de l'Environnement Corinne Lepage s'y connaît. Une des premières avocates de l'Hexagone à avoir choisi de pratiquer le droit de l'environnement, elle a représenté des victimes des marées noires causées par l'Amoco Cadiz en 1978. Ces jours-ci, elle plaide dans le procès entourant le naufrage de l'Erika au large des côtes bretonnes en 1999. Parallèlement, elle est députée au Parlement européen et vient de publier un essai intitulé Sans le nucléaire, on s'éclairerait à la chandelle, dans lequel, avec son mari Jean-François Bouvet, elle dénonce les scientifiques qui mettent leur talent au service d'intérêts privés. - Laura-Julie Perreault

     

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