Nous souhaitons partager autour de l'Ancien et du Nouveau Monde, avec nos coups de cœur, au gré de nos rencontres et de l'actualité, dans le cadre - ouvert - de la francophonie.
Cette année, centenaire oblige, la grande guerre était à l’honneur, avec Jacques Tardi qui a fait le pari de raconter dans son nouvel album, « Putain de guerre », toute la guerre de 1914-1918 de son origine jusqu’à sa fin, vue par les yeux d’un soldat français ordinaire qui sera de tous les fronts, de tous les combats, de toutes les horreurs. « C’est un ouvrier tourneur parisien. Il n’a pas beaucoup d’instruction, mais, même s’il n’a pas en main toutes les informations qui lui permettraient d’avoir une vue d’ensemble des événements, il comprend assez bien ce qui l’environne. Au fil du temps, il va mûrir, et acquérir une conscience politique », explique l’auteur.
Un sacré coup de crayon et une belle plume, ce Tardi. Les planches non encore colorisées permettent souvent de mieux voir les détails du dessin, et de le comparer, avant et après colorisation. Il ne vient plus à Angoulême depuis une vingtaine d’années, lassé par les bousculades des séances de dédicace (« Les gens poussaient tellement que je me suis retrouvé acculé à la cloison derrière moi, avec la table coincée dans l'estomac », se souvient-il).
Une autre exposition sur la première guerre mondiale, « l’adieu aux armes », d’un témoin direct cette fois, Gus Gofa. Grièvement blessé, il avait heureusement refusé l’amputation d’une jambe puisqu’il réapprit à marcher après la guerre. Destiné à une grande carrière militaire, il sera boxeur-dessinateur-écrivain. Cette exposition explore les diverses facettes de l’œuvre de Bofa, de la Belle Époque (au cours de laquelle il s’est déjà forgé un nom dans la presse satirique), aux années cinquante. Dessins de presse (affiches de « La Baïonnette »), albums personnels, livres illustrés, eaux-fortes, phototypies, couvertures de journaux, originaux ou reproductions…
Ces deux expositions mettent des images sur les souvenirs racontés par nos anciens, comme mon grand-père qui me parlait souvent de sa guerre et me montrait son « trou de balle » en travers de la cheville. Je me souviens aussi de ces vieux blessés dans leurs drôles de fauteuils roulants à manche à balais, ou avec leurs jambes de bois et leurs béquilles sous les aisselles. Pour les plus jeunes, voilà une belle façon de leur montrer la boucherie que ça a été, et le sort des femmes, qui ont tout géré en l’absence des hommes (ma grand-mère travailla sur un tramway, par exemple).
Willem, lauréat de l’an dernier, exposait également, mais on ne peut pas tout voir en une journée, et nos priorités étaient ailleurs…
« Une petite fille de 50 ans », Mafalda, petite Argentine de 6 ans, des années 1960. Joaquin Salvador Lavado, dit Quino, a créé en 1964 ce personnage de petite fille attachante, curieuse et incrédule. Elle n’aime pas la soupe, mais « la soupe est à l’enfance ce que le communisme est à la démocratie », dit-elle. Elle ose même traiter Fidel Castro de crétin.
Ce personnage, créé pour la publicité d’un produit qui ne sera jamais commercialisé, est de la même veine que les Peanuts ou Calvin et Hobbes, mais beaucoup plus politisée. Mafalda veut défendre la paix sur la planète, et sa rébellion est digne des plus grands révolutionnaires.
Une découverte, « Les Légendaires » de Patrick Sobral. Plutôt pour les jeunes lecteurs. Un monde de légendes et de sorciers.
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Dans la belle cathédrale romane fraîchement rénovée, une splendide exposition sur les « Pionniers du Nouveau-Monde » de Jean-François et Maryse CHARLES.
Située principalement Canada au milieu du XVIIIe siècle, l'histoire raconte les pérégrinations de Benjamin Graindal pendant cette période troublée des guerres franco-anglaises pour la possession des colonies en Amérique du Nord et principalement du Québec (Nouvelle-France à l'époque). Très belle rétrospective de cette émouvante histoire. Il y est même question de Rochefort, sa corderie royale, sa forme de radoub de l’époque… et de ses « miasmes » dus aux moustiques des marécages. D’autres expositions, bien sûr : « Ernest et Rebecca », « les fleurs qui ne se fanent pas », « 10 ans de bonheur selon Misma », « du Transperneige à Snowpiercer », et bien d’autres encore.
Grande place à la bande dessinée belge, plus petite pour les québécois représentés par les éditions de la Pastèque, occasion d’acheter « Paul à la pêche » de Michel Rabagliati, et puis un petit tour sur le stand de nos amis Philippe Garand et Ström, son complice, mais pas de nouvelle histoire du Petit Œuf cette année : elle est encore sur la planche à dessin.
Ambiance sympathique dans la rue, et des rencontres insolites, comme ce chanteur à l’accordéon qui se trouva une partenaire le temps d’une chanson…
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Le palmarès : Calvin et Hobbes récompensés par la ville d’Angoulême, mais tout le monde sait bien que leur père, Bill Waterson, ne viendra pas puisqu’il vit depuis des années, reclus chez lui.
Flonigogne