MIAMI (Reuters) - Du pétrole a pour la première fois atteint une plage de l'île de Freemason, dans le petit archipel des îles Chandeleur, au large de la côte sud-est de la Louisiane, annoncent les autorités américaines.
"Des équipes ont confirmé la présence de pétrole sur la plage, à l'extrémité sud des îles Chandeleur, sur l'île de Freemason", a déclaré à Reuters Connie Terrell, de la garde-côte.
"C'est la première confirmation de la présence de pétrole sur la côte reçue par le commandement unifié (de la lutte anti-pollution)", a-t-elle ajouté.
La compagnie britannique BP, propriétaire de la plate-forme qui a sombré le 22 avril après une explosion dans le golfe du Mexique, a réussi à colmater l'une des trois fuites mais le brut qui s'échappe du puits s'écoule toujours au rythme de quelque 5.000 barils par jour, soit environ 800.000 litres.
Le delta du Mississippi et les côtes de la Louisiane, de l'Alabama, du Mississippi et de la Floride, sont menacés par la marée noire. La nappe mesure plus de 200 km sur 110.
Pascal Fletcher, Guy Kerivel pour le service français
(AFP) – Il y a 3 heures
NEW YORK — La société Transocean, propriétaire de la plateforme exploitée par BP qui a explosé le mois dernier dans le golfe du Mexique, a indiqué jeudi qu'elle ignorait les causes de cet accident et mis en garde contre des "spéculations" en attendant le résultat de l'enquête.
"A ce stade, nous ne savons pas la cause du feu et de l'explosion" qui ont fait sombrer la plateforme, a déclaré Steven Newman, qui a pris ses fonctions de directeur général en début d'année, lors d'une téléconférence à l'occasion de la présentation des résultats trimestriels de Transocean.
"Nous sommes décidés à trouver ce qui a provoqué cet accident (...) mais nous pensons qu'il serait inconvenant de spéculer sur ce qui a pu provoquer la défaillance catastrophique d'un puits tubé et cimenté avant (le résultat) de l'enquête", a-t-il souligné dans des remarques liminaires.
M. Newman a encore indiqué que Transocean travaillait avec BP et les organismes gouvernementaux à tenter de stopper le flux de pétrole jaillissant du puits.
Un dôme d’acier de 98 tonnes est en route pour couvrir la plateforme pétrolière de BP qui a sombré au large des côtes américaines le mois dernier. Ce système n’a jamais été testé. Les résultats ne sont pas garantis mais après l’arrêt d’une petite fuite ce mercredi, et les bonnes conditions météorologiques, les gardes-côtes reprennent espoir même si, pour l’heure, 800.000 litres d’or noir continuent de s‘écouler quotidiennement dans le Golfe du Mexique.
“Ce week-end nous fixerons le dôme au navire de forage avec un ensemble de tuyaux pour pomper le pétrole afin de le ramener à la surface puis de le traiter. Si tout se passe bien, nous devrions débuter le traitement du pétrole à la surface et le colmatage de la fuite sous-marine dès lundi”, explique le responsable des opérations pour BP,
Doug Suttles.
Près de 200 bâteaux et des milliers de personnes, bénévoles, civiles et militaires, sont mobilisés pour préserver la faune et la flore des côtes américaines, du Delta du Mississippi à la Floride en passant par la Louisiane.
MAREE NOIRE - LES MARAIS DU DELTA SONT UN SANCTUAIRE POUR LA FAUNE
Une « pouponnière » en péril
Parmi les nombreuses espèces menacées par le pétrole, le pélican brun dont la population est estimée à 30 000 individus.
La marée noire qui menace de toucher le sud des Etats-Unis met en péril l’existence des marais que les experts qualifient de « pouponnière animale », à une époque de l’année durant laquelle oiseaux, tortues et mammifères donnent naissance à leurs petits.
« La pouponnière animale de l’Amérique du Nord est en danger », lance Mark Floegel de Greenpeace lors d’un entretien avec l’Agence France Presse.
Le printemps est, pour la faune, la période durant laquelle les petits voient le jour. Chez les tortues de mer, cela se traduit par la migration puis la ponte. C’est également à ce moment que les oiseaux nidifient. Pour eux, les marais de Louisiane, du Mississippi et d’Alabama constituent un sanctuaire.
Selon M. Floegel, le dauphin à gros nez et les tortues de mer seraient parmi les premières victimes de la marée noire engendrée par le pétrole échappé de la plateforme Deepwater Horizon.
Un constat que Mandy Tumlin, biologiste au département de la Faune de l’Etat de Louisiane, reprend à son compte. « Les dauphins sont particulièrement menacés parce qu’ils n’ont aucune fourrure pour les protéger du pétrole. Le pétrole s’infiltre dans leurs yeux, leur peau et les autres muqueuses ».
Son collègue, l’ornithologue Michael Carloss renchérit : « Les oiseaux profitent du printemps pour migrer. En ce moment, les pélicans bruns nidifient et leurs œufs ne devraient pas tarder à éclore. » Leur population est estimée à 30 000 en Louisiane.
S’il entamait une progression dans les marais, le pétrole s’inviterait dans la chaîne alimentaire de toute la région. Le « bayou » regorge de poissons et de crustacés dont les oiseaux, alligators et autres ratons laveurs sont friands.
« Dès lors, les poissons seraient souillés. Lorsque les pélicans ou d’autres oiseaux mangent ces poissons, c’est à leur tour d’être contaminés, puis à celui de leurs petits », explique M. Carloss.
Lorsqu’il est ingéré, le pétrole provoque des inflammations et des lésions internes à l’issue parfois fatale, rappelle Mandy Tumlin.
Une tortue de mer menacée de disparition
A cela s’ajoute le stress induit par la nappe de pétrole. « Un oiseau englué dans une nappe de pétrole va tenter de toutes ses forces de s’en extraire. S’il s’en sort, il sera totalement désorienté. Et puis, il y a les petits qui, si leurs parents meurent, se retrouvent seuls dans le nid sans rien à manger », poursuit Michael Carloss.
Les experts interrogés font unanimement part de leur inquiétude quant au sort de la tortue de Kemp, fortement menacée de disparition.
Ces tortues de mer, qui vivent exclusivement sur le continent américain, « sont en train de migrer vers les côtes du Mexique pour aller pondre sur les plages », explique Sarah Burnette de l’Institut Audubon.
Or, « la nappe de pétrole se trouve en plein milieu de leur trajectoire », soupire-t-elle.
Pour le moment, « une vingtaine de tortues ont été retrouvées mortes sur les plages de l’Etat du Mississippi, mais on ne sait pas si le pétrole est en cause », souligne Mme Burnette.
Pour Larry Schweiger, président de la Fédération nationale pour la protection de la faune, « la question n’est pas de savoir si la faune va être en danger, mais plutôt quand elle va l’être ».
« Je ne vois pas comment autant de pétrole peut se déverser dans l’écosystème sans qu’il y ait d’énormes répercussions », dit-il.
BP, qui exploitait la plateforme qui a sombré le 22 avril, estime que 800 000 litres de pétrole s’échappent chaque jour du puits situé par 1 500 mètres de fond.
Ostréiculteur en Louisiane, Al Sunseri commence à penser à l’impensable tout en déchargeant aux aurores ses sacs d’huîtres dans son pick-up. « Je crois que c’est la fin de notre entreprise », dit-il de P & J Oyster, qui collecte et cultive des huîtres depuis 134 ans. La marée noire, déjà désignée comme la pire jamais intervenue aux Etats-Unis depuis des décennies, menace la production des huîtres de la région. L’ostréiculteur continue pourtant d’espérer que le premier festival annuel de l’huître aura lieu comme prévu en juin.
La Louisiane produit 250 millions de livres d’huîtres par an, soit un tiers de la production américaine, précise Mike Voisin, de la fédération professionnelle des ostréiculteurs. « Les huîtres font partie de notre culture, de ce que nous sommes, déclare-t-il. Ma famille est dans le business depuis sept générations. On a de l’alcool d’huîtres qui coule dans nos veines. »
« On ne peut rien faire contre ça »
La marée noire menace également d’autres productions de la mer, telles que les crabes, les crevettes et un grand nombre de poissons. « Nous attendons l’arrivée du brut qui va détruire notre gagne-pain. Et il n’y a rien que nous puissions faire contre ça ! », se lamente Brent Roy, pêcheur à Venice, une petite ville du delta du Mississippi. La marée noire est « le pire des scénarios imaginables pour les pêcheurs », insiste-t-il. Maigre consolation, les autorités ont ouvert dès la semaine dernière la saison de la pêche aux coquillages, anticipant l’arrivée de la nappe de brut.
La Maison Blanche va soutenir un "relèvement significatif" des 75 millions de dollars américains du taux plafond pour les compagnies responsables de déversements de carburant, a indiqué mercredi le porte-parole Robert Gibbs.
"Nous serons en faveur d'une hausse significative de ce taux de plafond", a affirmé M. Gibbs lors d'un point de presse, sans toutefois spécifier si la Maison Blanche a accepté les 10 milliards de dollars comme limite.
"Je n'ai pas de chiffre spécifique. Je vais répéter ce que le président a dit, BP va recevoir la facture pour le rétablissement, le nettoyage et les dommages causés".
Selon une loi introduite après le désastre en Alaska en 1989 du pétrolier Exxon Valdez, les compagnies sont contraintes par la loi de payer pour le nettoyage total et les coûts de confinement pour toute fuite de leurs intallations après un accident. Toutefois la législation plafonne les dommages pour lesquels une entreprise est responsable à 75 millions de dollars à moins que la compagnie ne soit coupable de "négligence flagrante".
Un projet de loi du sénateur démocrate de la Floride, Bill Nelson, qui est en train d'être discuté au Congrès, pourrait fixer le taux de plafond à 10 milliards de dollars. Harry Reid, le leader démocrate du Sénat américain, a indiqué mercredi qu'il soutient la proposition.
Une explosion a eu lieu le 20 avril dernier sur la plateforme de forage Deepwater Horizon, située à environ 42 km au sud-est de Venice, en Louisiane. Onze foreurs ont été tués.
L'appareil de forage, propriété de Transocean et loué par BP, a coulé le 22 avril après avoir brûlé pratiquement pendant 36 heures, et la tête du puits inexploité laisse couler à flot le pétrole dans le golfe du Mexique.